Description
Trente ans de poésie-graphisme. Introduction
Depuis une trentaine d’années que je compose de la poésie, et dès le début, dans les années 1972-1978, période la plus prolixe pour moi, j’ai éprouvé l’envie, presque le besoin de proposer à la présentation du lecteur mes poèmes accompagnés par des dessins, des illustrations, des graphismes, faire de la Poésie-Graphisme, et, bien plus tard, des photos. Ces projets se sont réalisés à l’occasion de rencontres formidables avec des gens extraordinaires : en voici le compte-rendu chronologique.
La chronologie.
La première expérience de poésie-graphisme fut le recueil élaboré, presque à la main, du titre Poésies, tiré à onze exemplaires, grâce à la collaboration amicale de copains de fac. Parmi eux, Emmanuel Mourlet, dit Manouck qui habitait Saint-Ménéhould, et qui poursuivait ses études de droit, pendant que j’étudiais les Lettres Modernes à la UER de Lettres de Reims. Manouck réalisa trois transferts à l’aide de la technique au trichloréthylène, pour illustrer les poèmes L’amour,La maladie ment et L’œil. Manouck fut donc mon premier illustrateur, et je l’en remercie.
la salade aux l’Art
Quelques années plus tard, en 1980- 1981, au début de ma carrière d’enseignant dans les Ardennes, j’ai côtoyé une autre bande de copains à L’Association Revinoise d’Education et de Loisir, (L’AREL), qui, grâce à son animateur et à quelques figures pittoresques de la vallée de la Meuse, décida de lancer une revue artistique : la Salade aux l’Art. J’étais parmi les participants à l’aventure, et je proposai à un dessinateur local, Claude Laporte, quelques poèmes à illustrer ; il réalisa trois dessins à l’encre de chine sur papier : ce furent pour les poèmes Clochard, Alcool et J’étais très drôle. Ces poèmes et dessins furent effectivement publiés dans la Salade aux l’Art, n° 0.
Angoisses et Rencontres
Autre lieu, autre rencontre, autre livre : Angoisses et Rencontres, recueil qui est né, comme je l’ai écrit en quatrième de couverture, « par hasard un jour de discussion, en février 1989. Hasard d’une rencontre entre deux enseignants dans la salle de professeurs austère d’un collège ardennais, au détour d’une conversation sur l’art et la poésie : elle allait bientôt exposer ses peintures, et il avait déjà publié un premier recueil de poèmes, en 1980. Il n’écrivait plus guère, mais avait envie de reprendre la plume. Elle souhaitait vivre une autre expérience, celle de mettre en graphisme les textes d’un autre. Alors, l’idée germa… ».
Dans sa préface, Philippe Rigault, autre grand ami, écrivit : « La matière était là, et après une lecture personnelle, Brigitte Maire s’est attachée à une ambiance, à partir de son propre vécu, avec son propre regard d’artiste et sa sensibilité. Ambiances plutôt que dessins, graphismes plutôt qu’illustrations, se mêlent aux textes, leur répondent : texte et dessin côte à côte ou bien texte sur dessin, et voilà, renouvelés, les thèmes. Le mot traduit l’image, volontairement en noir et blanc, et l’image donne une admirable profondeur au mot ». Brigitte Maire réalisa ainsi 39 monotypes à la gouache noire, pour illustrer ce recueil.
La peinture.
Brigitte Maire m’a sans doute motivé à m’adonner moi-même à la peinture, en me donnant de précieux renseignements quant à l’utilisation de la peinture à l’huile, comment préparer le médium en mélangeant par tiers l’huile de lin, l’essence de térébenthine et le siccatif de Courtrai, et à la préparation de supports pas trop chers à mettre en œuvre, la partie granuleuse d’un panneau d’isorel, qu’il suffit d’enduire de deux couches de peinture acrylique blanche, et en la regardant travailler, pendant que nous animions quelques ateliers « Poésies-Graphismes », en 1990, dans les collèges ardennais et à la Bibliothèque municipale de Charleville-Mézières. Du fait, j’ai commencé à peindre mes premiers tableaux dès 1989, puis j’écrivis et illustrai un livre pour enfant en 1991, Les Dernières Vendanges de Petite Hotte et Panier d’Osier. Et j’ai pu exposer pour la première fois, en 1992, Peindre et dire Mailly.
Pauvre Bitos!
C’est dans cette période, entre 1989 et 1998, que féconde fut ma peinture. Alors, j’ai eu l’idée de rassembler tous mes travaux d’écriture, et peut-être de peinture, et j’ai mis à contribution ma femme Marie-Annick, qui avait pratiqué la poterie et le céramique, et qui avait dessiné et réalisé des abat-jour pour lampe de chevet : elle illustra à l’aide de ses sables colorés sur polyphane un long poème épique que j’avais écrit en 1977, Pauvre Bitos. En quatrième de couverture, j’écrivais : « Ce long poème épique de 534 vers, composé en mars 1977, plonge le lecteur dans un inattendu tour du monde de lieux et de thèmes dans lesquels le personnage, pauvre Bitos, est l’œil Voyageur d’Espace et de Temps.
Occasion de rencontre avec l’Histoire littéraire aux détours de nombreux titres d’ouvrages célèbres, qui sont la matière première du poème. Les 21 œuvres originales de Marie-Annick Saget Butori en sable coloré sur polyphane, entraînent le lecteur dans d’autres voies sur le chemin de sa propre vision du monde, les chaînes ou les colombes de la liberté, la dualité des personnages et des objets, se fondent au texte et lui apportent d’autres « colorations » qui ne manqueront pas d’être appréciées. Je publiai ce recueil en 1998.
Mon vieux Rimbaud.
Ainsi 1998 marque véritablement la naissance de notre maison d’Auto-éditions. Je demandai encore à ma femme d’illustrer un autre poème, Mon vieux Rimbaud, « Voyage dans l’œuvre du poète en un peu plus d’une centaine de vers, à travers les titres de ses pièces poétiques, sorte d’hommage au Grand Poète ». Annick réalisa trois tableaux en sables colorés, et j’eus l’idée, déjà, de réaliser un nouveau recueil en « hommage aux quatre artistes qui ont trouvé quelque intérêt à l’illustration de ma poésie », et j’y intégrai, en plus de Mon vieux Rimbaud, neufs autres poèmes, ceux illustrés par Emmanuel Mourlet, Claude Laporte et Brigitte Maire.
Qu’en dire ?
La même année, je profitai de cet élan vers la peinture pour m’essayer moi-même enfin à l’illustration : je choisis la première partie, Eha, du recueil Qu’en Dire, et mis en image les quinze poèmes avec des aquarelles sur papier : « L’œil parcourt les formes dramatisées en femme-ruban, en objets, en fleurs ou en animaux, s’échappe à la rencontre d’autres personnages au long cou, à l’ovale à la Modigliani : toute une galerie de personnages, dont Eha, la femme paysage-visage du premier poème qui a donné le titre au recueil. ».
Gérard Birling.
Ce n’est qu’en 2003 que mes projets de Poésie Graphisme rebondirent, là encore à l’occasion d’une nouvelle rencontre, avec le professeur d’Art plastique du collège où je venais d’être nommé : « ce recueil de Vingt poèmes (extraits des Poèmes Inédits), choisis et illustrés par Gérard Birling, est né de la volonté d’un poète et d’un artiste de travailler ensemble. Une formidable unité transparaît dans cette série d’une vingtaine d’aquarelles, réalisées par Gérard Birling, à partir de vingt poèmes de Yves Saget, qu’il a choisis lui-même, unité de ton, unité de type de personnage, mais une extrême variété dans le choix qui ont été faits.
Que dire de cette traîtrise symbolisée par cette formidable représentation d’un globe terrestre on ne peut plus réaliste, qui flotte ans l’atmosphère, et dont une vilaine sorcière semble balayer la surface. Pour y faire le ménage ? Il fallut à Gérard Birling deux années pour achever les illustrations, et le livre fut publié en 2005.
Calligrammes.
Nouveaux projets, en cours de réalisation, cette année 2008 : je travaille actuellement sur un nouveau recueil de poèmes Calligrammes, Textos, Provocations Loufoqueries, Parodies et autres Rêveries Oulipiennes dans lequel je m’amuse à composer en mélangeant le mot, l’écriture le graphisme, afin d’en faire un tout original. Les mots ne forment plus seulement des phrases, mais aussi des graphismes, grâce à la magie du traitement de texte qui permet beaucoup de fantaisie dans les choix de couleurs, dans la grosseur des lettres… Les œuvres produites doivent beaucoup aux calligrammmes d’Apollinaire.
Poésie et photographie.
Collaboration la plus récente dans le temps, celle avec une photographe, Nicole BOUTIER, rencontrée à l’occasion d’une soirée flamenco dans la Maison pour tous du quartier : autre expérience à mener, celle de mettre en image, à l’aide de photos, les poèmes que je viens de lui proposer.
Je souhaite que ce livre, au format A4, pour que l’image soit plus prégnante qu’au format A5, donne autant de plaisir au lecteur que j’ai eu à le composer, à le mettre en image, à le mettre en page : il m’a ainsi permis de me replonger avec délectation dans mes trente dernières années de mes Poésies- Graphismes.
Une exposition.
Ce livre a aussi été présenté sous forme d’une exposition d’une trentaine de cadres au format A3, dans une Maison pour tous de Montpellier, fin septembre et début octobre 2008.
L’ Oeil
Je recueille
Une dent
Un cercueil
Dandinant
Et d’un treuil
Me mouvant
Je m’effeuille
Je suis blanc.
Un cercueil
A l’oreille
Comme un vol
De corneille.
Un oeil rond
ferme l’œil
D’une feuille
A l’oreille.
Clochard
Si vous le rencontrez
Au coin de votre porte,
Laissez-le babiller
Chaque soir, de la sorte.
Les yeux enamourés
D’ivresse qui vous choque,
Donneront à penser
Qu’il a subi un choc.
Le choc de ceux qui vivent
Tous les jours au hasard
Sans abris et sans vivres.
Sur les grands boulevards
Voyez-le qui s’enivre
Ce valeureux clochard.
Il m’est venu un doute
Il m’est venu un doute
La route
Que je traverse en homme
Foisonne
Comme esprit en délire.
Désir
De troublants paysages
D’images
Et de mystères à deux
Heureux.
Volonté de voyage
Et rage
De cloisons éclatées
Brisées
Ne plus vouloir de mur
En dur.
Il m’est venu un doute
Ecoute
L’appel des libertés
Prends-les !
Avis
Il n’y pas encore d’avis.